Voilà une semaine, les mystérieux éditorialistes
se cachant pudiquement sous le pseudo d'Alan Smithee commettaient la première
partie de cet édito exquis. Voici donc la suite et fin, toujours
aussi... unique. Bonne lecture.
"Un édito exquis : Dans le cadre d'une étude sociologico-anthropologique
des lecteurs de manga, Mangaverse vous propose un petit reportage sur une journée
bien particulière : deuxième partie.
A peine avait-elle repris ses esprits que Mélanie s'en alla retrouver
ses amis, les Choupis girls. Elles étaient toutes là, il y avait
Gwendoline, la vierge frigide choupie qui se bat contre les méchants
garçons lubriques ; Marie-Victoire et Marie-Marcelle les jumelles pas
monozygotes (mais qui s'habillaient pareilles) mais super choupies avec des
pouvoirs extrasensoriels ; et enfin Cécile, la choupette qui trouvait
tout ce rassemblement autour d'une culture néo-imperialiste pas sympa
pour un sou (elle ne faisait d'ailleurs même pas de différence
entre nekketsu et hentai et ne savait pas si shônen prenait un accent
circonflexe, c'est dire son niveau d'incompétence), mais bon, disait-elle,
il fallait bien trouver des protectrices au collège et les fans de la
Tchouk Tchouk Musik étaient bien plus perverties.
Tout ce petit monde n'hésita pas un instant à compatir au récit
de Mélanie-choupie surtout Marie-Marcelle qui était en fait un
garçon prénommé Marcelin. La pauvrette ne savait, en effet,
plus quoi penser car engoncée dans son rôle de fausse jumelle certes
" un peu " masculine, elle/il ne savait plus si il/elle devait se
lancer dans un triangle amoureux (Mélanie est amoureuse de Marcelin,
Marie-Marcelle de Mélanie, et Marie-Victoire de personne mais jalouse)
ou bien si elle/il devait faire fi de toutes ces conventions en se lançant
dans du " forbidden girls' love ", en révélant à
sa sur jumelle son émoi devant ses culottes Hello Kitty. Mais surtout,
devait-il s'avouer qu'il était en fin de compte un homme lesbien ?
Cette pensée flottait dans l'atmosphère, aussi transparent qu'un
phylactère. Soudain, Mélanie se sentit poussée de derrière,
manifestement par un fan trop pressé pour rejoindre le défilé
de cosplay. Dans son élan, elle tomba vers l'avant et s'agrippa d'une
main à ce qu'elle put pour ne pas perdre son équilibre. "
Ergh, ces fans, p'tain ", pensa-t-elle. Ce n'était qu'à ce
moment-là qu'elle découvrit avec horreur ce dont elle a attrapé
: c'était le phylactère ! Ou plus précisément, la
partie directionnelle de la bulle qui continuait à attribuer cette pensée
vers notre homme lesbien. Ce n'était plus une bulle, mais un ballon,
sauf qu'il ne flottait pas de gauche à droite, mais restait rigidement
collé à son géniteur. Mélanie pensa : " Non,
c'est une blague
non, non
longue journée
trop fatiguée,
la petite
faut se ressaisir
". Elle secoua un peu la bulle
dans sa main, mais non, ça restait bien en place. Elle lâcha le
" truc " et recula, quand les lettres dans la bulle disparurent et
se métamorphosèrent. Elle y lut, ou plutôt vit passé
des phrases flasher : " Elle
non, mais
comme Paul Eluard
voilà, en fait !
". Mélanie sentit comme une
fluctuation de son sang depuis et vers sa tête. De ce fait, elle éprouva
une forte migraine et un cruel manque d'oxygène dans le cerveau. Elle
tituba vers le côté et s'effondra sur le sol. Juste avant de totalement
perdre conscience, elle entendit une voix crier : " Appelez une ambulance
! "
Mais laissons Mélanie nous raconter la suite, manifestement secouée
et retrouvant un ton bien sérieux : " Lorsque j'ai ouvert les yeux,
j'ai cru que j'étais arrivée au Paradis : Gackt se tenait juste
au dessus de moi ! Je me rappelais le terrible passage de Guru Mint no Peach
Maniac où Aya rêve de Kyo alors qu'en fait, elle est prisonnière
du terrible Shank l'Impitoyable. Ainsi, c'est avec une légère
angoisse que je me suis pincée la joue pour vérifier que tout
cela était bien réel. La bonne nouvelle, c'est que je n'étais
pas prisonnière (bien que cela aurait pu être terriblement excitant,
surtout le passage où j'aurai été sauvée par le
vrai Gackt). La mauvaise, c'est que mon sauveur était une sauveuse...
et c'est dans ces grands moments d'adversité qu'il faut avoir de la répartie
! Je me suis alors écrié en me levant d'un bond : " Merci
beaucoup, je vais beaucoup mieux mais là il faut vraiment que j'y aille
: j'ai piscine... euh non, je voulais dire karaoké..." ". Au
dit espace, Mélanie eut l'heur de trouver un vaste espace vivable pour
s'installer, flappie, et ainsi récupérer de sa défaillance
et de sa journée harassante. Et oui, mille remerciements soient rendus
à une rencontre-dédicace avec les Plastic Tree organisée
un peu plus loin, tous les fans de J-Music avaient déserté l'endroit.
Et puis, quoi de mieux pour finir la journée que de gazouiller sur Dir
en grey, X-Japan et Malice Mizer. Le Visual-Kei, c'est vraiment trop imbattable.
Trop forte également était la pression de la foule pour sortir
de cet espace pantagruélique. Alors que les portes étaient en
train de se fermer, notre jeune Mélanie Fanette faillit se faire écraser
par une horde gargantuesque de moutons de panurge. " Le peuple de Paris
est tant sot et inepte de nature ", se dit-elle. Mais comme un malheur
ne vient jamais seul, elle se s'apercevait qu'elle avait perdu sa carte de transport.
" Ainsi sont toutes femmes, femme ", lui aurait dit son grand-père,
légèrement misogyne. Elle terminait cette journée véritablement
exténuée, telle Hachi après une journée de shopping
et il n'était pas question pour elle de repartir dans une nouvelle aventure.
D'ailleurs, elle ne se rappelait même plus par quel moyen de transport
elle était venue à la convention ce matin. Or, tout vient à
point à qui sait attendre car elle eut la surprise de voir que son père
arrivait dans sa voiture de sport, une " Puma " comme elle disait.
Il ne lui posa aucune question, ce qui tombait bien car elle ne se souvenait
pas non plus de tout ce qu'elle avait fait durant cette journée, et de
toute façon, elle n'avait ni l'envie ni le temps de procéder à
une analepse, bien que l'ignorance soit mère de tous les maux. Sa mémoire
digne d'un poisson rouge, japonais évidemment, expliquait peut-être
pourquoi elle s'aperçut alors seulement qu'elle s'était préparé
un bento ce matin. Cela lui aurait évité bien des ennuis, mais,
sans savoir pourquoi, elle avait l'impression que la journée aurait été
moins palpitante sans cela. Quand elle parvint enfin chez elle (elle ne se souvenait
pas non plus du nom de sa ville ni de tout autre détail servant à
la cohérence de toute histoire), elle n'eut qu'une hâte : y retourner
l'an prochain. Tirez le rideau, la farce est jouée !
Alan Smithee"